Pourquoi mon chien a de longues oreilles

- Tu vois ce qui arrive ?! s’écria mon amie Coco. Je t’ai dit maintes fois de ne pas laisser le chien tout seul avec le chat, mais tu ne m’as jamais écoutée !

- Mais je ne les ai pas laissés ensemble ! Quand je suis partie au travail, chacun était ni  sa place, mais… Tachouille reste dans sa niche, au milieu de la cour, jour et nuit, souvent attaché ni  une chaîne. Il n’y a que l’hiver qu’il dort dans le vestibule de la cuisine, dans un panier garni d’un matelas.

Imagine, dehors il pleut, il fait froid et le chat couleur café avec des oreilles noires et des yeux bleus rentre dans le jardin et le traverse en tâtant les dalles pour voir si elles méritent d’être touchées par ses augustes pattes, tout en jetant un regard narquois au chien qui tire sur sa chaîne. Puis il lui tourne le dos, en remuant rythmiquement sa queue dressée et se dirige vers la maison où il pousse sa chatière taillée dans ma porte d’entrée.

Des fois, le maître, c’est ni  dire moi, permet également au chien d’entrer dans la maison, de faire son tour dans les chambres. Et souvent, il aperçoit le chat dans le lit large et haut et il lui aboie dessus.

Un jour où les maîtres étaient absents et que le chat s’était vautré sur l’édredon, Tachouille se mit sur deux pattes devant la fenêtre et regarda ni  l’intérieur. Le chat dormait comme un bienheureux.

Mais il n’y avait pas que le chien ni  zyeuter comme ça. Le coq, les trois poules et la chevrette étaient venus aussi, et même un petit hérisson, rendu curieux par l’attroupement formé devant la fenêtre, qui entreprit de grimper le long de la vigne vierge. Deux hamsters dorés qui n’osaient pas sortir de sous le poulailler par peur du chat grimpèrent sur la fenêtre voisine. L’âne déboula lui aussi et posa ses pattes avant sur le rebord de la fenêtre, entre les deux hamsters. Comme il s’était échiné toute la journée ni  traîner la charrette remplie de choux, il demanda ni  ses deux voisins dorés

- Mais qu’est-ce qu’il a fait comme travail celui-lí  pour dormir autant ?

Les loirs, rendus revêches par le mauvais temps et par le mal de dos, car je leur avais permis de s’approvisionner en grain dans mon champ, répondirent d'une voix aigre :

- Du travail, celui-lí  ? Il n’en fiche pas une, contrairement ni  nous ! Le maître lui met sa nourriture sous le nez.

Les poules caquetèrent.

- Est-ce qu’il fait des œufs, par hasard ?

Et le coq :

- Il ne fait ni des œufs comme vous, ni le réveil comme moi.

- Tais-toi, c’est de ta faute ! Le matin tu ne chantes pas assez fort et il ne t’entend pas. 

-  Quoi ? Le maître se réveille uniquement grâce ni  mon chant.

Et le coq poussa un cocorico si puissant que les autres se couvrirent les oreilles et le chat se retourna dans son sommeil. Le coq chanta une deuxième fois et les vitres se brisèrent en mille morceaux. Le chat bondit, effrayé et se hérissa en voyant toutes ces têtes ni  la fenêtre.

Furieux contre le chien qui avait montré ni  toute la basse-cour quel animal paresseux il était, le chat décida de se venger.

Le lendemain il allât voir le chien et il déclara, en entortillant sa queue touffue autour de ses pattes :

- Voilí  ce que je me suis dit : quand le maître s’en va et qu’il te laisse libre dans la cour, tu n’as qu’í  venir dans la maison, toi aussi, pour dormir dans le grand lit moelleux. Seulement, suis mon exemple et n’oublie pas de te laver les pattes, sans quoi tu me mettrais dans le pétrin.

Tout ni  sa joie, Tachouille n’y réfléchit pas ni  deux fois. Dès que les maîtres s’en allèrent, il vint se présenter devant la chatière. Le chat lui parla de derrière la porte :

- Sapristi! La maîtresse a tellement chauffé la maison que je pense ouvrir un peu la fenêtre pour rafraîchir l’air.

- Ne fais rien de la sorte, s’il te plaît ! supplia le chien qui soufflait des nuages de vapeur par le nez, trempé jusqulí  l’os par le crachin d’automne. Et il fourra sa tête dans la maison.

- Stop, fit le chat, fais voir tes pattes d’abord !

Le chien passa ses pattes une ni  une par la chatière mais le chat fit le difficile.

- La patte arrière gauche n’est pas très propre, va la passer au jet. Le chien fila une fois de plus se laver les pattes, puis il poussa la chatière et voulut rentrer mais il ne réussit pas ni  passer parce qu’il était un peu plus grand que l’ouverture. Après beaucoup d’efforts il réussit ni  rentrer de moitié mais il resta coincé

Cependant, le chat ne cessait de l'encourager.

- Allez, fais un effort !

Le chien continuait ni  pousser, mais en vain.

- Ta fourrure est trop épaisse et trop bouclée, mais ne bouge pas, je vais te tondre, comme ça tu seras plus mince et tu passeras sûrement.

Le chat apporta les ciseaux et se mit ni  taillader la fourrure du chien. Le chien glissa quelques centimètres de plus et se trouva complètement bloqué. Désormais, il ne pouvait ni avancer ni reculer.

En voyant cela, le chat regarda la grande pendule de la maison et se mit ni  se lamenter

- Hélas, il ne nous reste plus beaucoup de temps avant le retour des maîtres et nous allons en prendre pour notre grade ! Et le chat, en faisant une tête désespérée, se mit ni  tirer le chien par les oreilles.

Tachouille, aussi inquiet que le chat, ne pipait mot et se laissait tirer les oreilles, dans l’espoir de se sortir plus vite de ce guêpier. Le chat tirait, tirait et le chien lui disait « tire plus fort, s’il te plaît » et il avait tellement peur que les maîtres les attrapent qu’il ne sentait même plus la douleur.

Quand je suis rentré ni  la maison, j’ai trouvé Tachouille coincé dans la chatière, avec les oreilles allongées comme celles des cockers et la fourrure toute pelée. J’ai du scier la porte pour le sortir de lí , après quoi je l’ai emmené se faire tondre entièrement. Il a dormi dans le vestibule le temps que sa fourrure repousse. Et voilí  l’affaire, c’est depuis qu’il a les oreilles longues… Mais ça lui va mieux comme ça !

- Clest vrai, admit Coco. Et qu’est-il arrivé au chat ?